Une erreur qui aurait dû être évitée, Centrale de Bécancour,

 Le jeudi 13 décembre 2007 LE SOLEIL - POINT DE VUE

John Burcombe   Mouvement Au Courant

En lisant «Arrêt de la centrale à Bécancour: Hydro devra verser 150 M $ à TCE» sous la plume de Pierre Couture, dans Le Soleil, 7 décembre 2007, il faut souvenir que la centrale de cogénération de Bécancour était un projet soumis à Hydro-Québec Distribution en réponse à un appel d'offres dans le cadre réglementaire créé par la loi 116 de l'an 2000, qui a soustrait de la Régie de l'énergie sa juridiction sur la production d'électricité.

Cette loi, demandée par Hydro-Québec, a effectivement créé Hydro-Québec Distribution, une instance distinct réglementée par la Régie, et Hydro-Québec Production, une autre instance non réglementée. De plus, la loi a spécifié un bloc d'électricité «patrimoniale» qu'Hydro-Québec Production fournirait dorénavant à Hydro-Québec Distribution à un prix fixe. Au-delà du bloc patrimonial, Hydro-Québec Production n'a aucun obligation à fournir d'électricité aux Québécois.

En effet, Hydro-Québec Distribution est contraint à procéder par appel d'offres pour combler la demande au-delà du bloc patrimonial et Hydro-Québec Production peut abstenir de ces appels d'offres.

C'est dans ce contexte que le projet de production privée de TransCanada Energy (TCE) était conçu, soumis et accepté par la Régie en 2003. Cependant, le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) a conclu, suite à des audiences, que: «[le projet] Bécancour correspond à un choix de dernier recours... [qui] se justifie que si toutes les autres possibilités ont été épuisées. Or, la démonstration n'a pas été faite à ce jour.»

Le future du projet était remis en question dans le débat de 2004 sur le projet du Suroît d'Hydro-Québec Production. Dans son Avis sur le projet du Suroît, la Régie a défendu son approbation de Bécancour en indiquant que: «le refus d'autorisation [par le gouvernement] du projet de TCE mettra en danger la sécurité énergétique des québécois dès 2007».

Bien que le gouvernement a finalement rejeté le projet du Suroît, il a, au même moment, donné le feu vert au projet Bécancour, au grande déception de ceux qui ont argumenté que la construction de l'un ou l'autre des projets hypothéquerait l'atteint des objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre (GES) du Protocole de Kyoto, un défi que ce même gouvernement a promis de relever.

Hydro-Québec Distribution et nous ses clients goûtent maintenant la médicine de la loi 116. Il est fort probable que sous la juridiction originale de la Régie de l'énergie, le projet de Bécancour n'aurait jamais vu le jour. En effet, sous l'ancien régime, Hydro-Québec aurait été obligé de produire: «...un plan de ressources proposant des stratégies pour réaliser l'équilibre entre l'offre et la demande de l'énergie (...) par des moyens agissant tant sur l'offre que sur la demande en tenant compte des préoccupations économiques, sociales et environnementales...».

En attendant l'abrogation de la loi 116, il faut vivre maintenant avec la centrale de Bécancour. J'applaudis la décision de suspendre sa production, du fait que nos émissions de gaz à effet de serre (GES) seront ainsi réduites d'environ 1,6 mégatonne (Mt) en 2008, soit l'équivalent de 350 000 automobiles. La suspension pourrait être reconduite en 2009 et j'espère même voir un prolongement jusqu'à 2012, pour ainsi éviter l'émission totale d'environ 8 mégatonne de CO2 pendant la période d'application du Protocole de Kyoto, soit de 2008 à 2012.

L'ampleur de cette réduction de 8 Mt devrait être vu dans le contexte de la révision du 6 décembre du Plan d'action sur les changements climatiques où le gouvernement prévoit atteindre une réduction annuelle de 14 Mt en 2012 (soit un total optimiste pour la période 2008-2012 d'environ 42 Mt).

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